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TRACC : tout savoir sur les nouvelles projections de référence pour l’adaptation au changement climatique.

Dernière mise à jour : 12 nov.


Le gouvernement prépare actuellement le 3e plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC3 pour les intimes). Comme s’adapter c’est d’abord anticiper, ces travaux ont été précédés par la publication de nouveaux scénarios de réchauffement climatique : la trajectoire de référence pour l’adaptation au changement climatique, ou TRACC. Dans cet article, nous allons voir quels sont ces scénarios et comment les projections climatiques correspondantes sont réalisées.


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La France s'adapte - vivre à +4°c - TRACC

Les scénarios de la TRACC. En version compréhensible.


Même si l’acronyme ne vous dit rien, vous avez probablement entendu parler de la TRACC en début d’année dernière. En effet, en février 2023, le ministre de la transition écologique annonçait la création d’un nouveau scénario: “une trajectoire à quatre degrés”. Auparavant la stratégie d’adaptation française anticipait un niveau de réchauffement beaucoup plus limité. L’annonce avait donc suscité de nombreuses interrogations et polémiques.


Un réchauffement de +4°C, mais où ? Par rapport à quoi ? Et envisager un tel niveau de réchauffement n’est-ce pas entériner l’échec de la lutte contre le changement climatique ? C’est ce que nous allons voir.

Pour résumer très rapidement les débats : la communication autour de ces nouveaux scénarios de référence a été semée d’ambiguïtés et de cafouillages. Si vous y avez échappé, tant mieux pour vous, si vous avez essayé de suivre et que vous n’y comprenez rien, oubliez tout et reprenons simplement.

En réalité, il y a deux scénarios :


  • Un scénario tendanciel correspondant à un réchauffement de 3°C à l’échelle mondiale par rapport à la période 1850–1900.

    En effet, selon la dernière évaluation de l’ONU, les engagements de réduction des émissions pris par les États nous amènent probablement vers un réchauffement mondial de 3 à 3.5°C à la fin du siècle par rapport à l’ère préindustrielle (plus à ce sujet ici).


  • Un scénario “Accord de Paris” avec deux variantes : optimiste (réchauffement de 1.5°C à l’échelle mondiale par rapport à 1850–1900) et pessimiste (réchauffement de 2°C).

    En effet, l’objectif de l’Accord signé en 2015 est de contenir “l’élévation de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2°C par rapport aux niveaux préindustriels et en poursuivant l’action menée pour limiter l’élévation de la température à 1,5°C par rapport aux niveaux préindustriels”.


C’est plutôt simple, non ?


Mais alors où est le fameux scénario de 4°C ?


Un peu trop simple, même… Mais on peut arranger ça : comme la température n’augmente pas de façon homogène à la surface de la planète, pour peu que l’on sache appliquer un masque aux projections climatiques, on peut traduire le niveau de réchauffement global en un niveau équivalent dans une sous-région. Prenons, par exemple, la France métropolitaine : combien de degrés en plus aura-t-on en France lorsque la planète se sera réchauffée de 3°C ?


Pour que ce soit un peu plus compliqué, on peut aussi prendre une période de référence différente : un réchauffement de 3°C par rapport à la moyenne de 1850–1900 correspond à un réchauffement de combien de degrés par rapport à… disons… 1900–1930 ?


Maintenant faisons les deux en même temps, et vous avez l’origine de fameux 4°C :


Le scénario tendanciel, qui conduit à un réchauffement de 3°C à l’échelle mondiale par rapport à 1850–1900, donne une augmentation de la température de 4°C en moyenne en France par rapport à 1900–1930.

Vous trouvez que c’est encore un peu trop facile ? Ajoutez que les variations de température ou de précipitations des projections TRACC ne sont pas calculées par rapport à 1850–1900, ni par rapport à 1900–1930 mais par rapport à 1976–2005.


On aboutit ainsi à cette bizarrerie : selon les projections publiées par Météo France, dans le scénario de réchauffement de 4°C en France métropolitaine le réchauffement moyen en France métropolitaine sera de… 3.4°C .


image homme devant un chateau. Sur l'image, il y a écrit "pas mal non ? C'est français"

Pourquoi les projections de la TRACC semblent optimistes


Au-delà de la confusion créée, cet enchevêtrement de périodes de références a un effet plus problématique : même si le plan national d’adaptation adopte un scénario qui se veut pessimiste, on a l’impression que les projections qui en découlent sont plutôt rassurantes.


Ainsi, par exemple, dans ce scénario de réchauffement de 4°C, l’augmentation de température moyenne à Paris ne serait que de 3.0°C (selon la projection médiane). Ouf… On s’en sort bien ! Qui s’apercevra que le premier chiffre fait référence au réchauffement par rapport à un climat moyen de 1915 et le second à un réchauffement par rapport au climat moyen de 1990 ?


D’autant plus que même que si le “scénario de réchauffement de 4°C” [en France métropolitaine par rapport à 1900–1930] est souvent présenté comme pessimiste, ce n’est pas le cas. Comme on l’a vu plus haut, la poursuite des politiques actuelles nous amènerait probablement vers un réchauffement plus élevé.


En réalité, le nouveau scénario “quatre degrés” de la TRACC n’est pas pessimiste : c’est ce qui nous attend si les engagements actuels sont tenus et qu’on est plutôt dans la fourchette basse du réchauffement anticipé par les modèles climatiques…

Quelle est la relation entre les scénarios de la TRACC et ceux du GIEC ?


Les scénarios du GIEC s’appuient sur des hypothèses d’émissions de gaz à effet de serre dans les prochaines décennies, par exemple une réduction rapide pour les scénarios RCP2.6 ou SSP1–2.6 ou des émissions intermédiaires pour les RCP4.5 et SSP2–4.5. Des modèles climatiques sont ensuite utilisés pour anticiper l’évolution de la température en fonction de ces émissions. C’est ce qu’on appelle des projections à climat évolutif : un même scénario va donner un niveau de réchauffement et un climat différent selon l’horizon de temps auquel on se projette.


La logique de la TRACC est différentes puisque les scénarios portent directement sur le niveau de réchauffement atteint. Il s’agit de projections à climat constant. On s’intéresse au conséquences d’un climat réchauffé de 1.5, 2 ou 3°C à l’échelle mondiale peu importe la trajectoire d’émissions qui amène à ce résultat et l’horizon de temps.


Réaliser des projections pour les scénarios de la TRACC revient donc à se poser la question : comment passer de la logique de climat évolutif du GIEC, pour laquelle il existe une abondance de projections climatiques, à celle du climat constant ?

La méthode utilisées consiste à prendre une projection classique, à climat évolutif, et à isoler la période où le climat moyen correspond au niveau de réchauffement souhaité.


Pour obtenir une projection dans un scénario à climat constant, on va procéder de la façon suivante :


  1. Comme on souhaite étudier un réchauffement jusqu’à 3°C, on va prendre une projection à climat évolutif pour un scénario d’émissions élevées (RCP8.5 ou SSP5–8.5). En effet avec des scénarios moins pessimistes, ce niveau n’est pas toujours atteint avant la fin de la période de projection.

  2. Ensuite, on calcule la température moyenne mondiale sur une période glissante suffisamment longue, par exemple 20 ans. Puis le réchauffement par rapport à la période de référence 1850–1900.

  3. A un moment, la valeur de la moyenne glissante va atteindre le niveau souhaité. Pendant les 20 ans centrés autour de l’année où cette valeur est atteinte (appelée “année pivot”), le climat correspond donc en moyenne à un climat réchauffé de 3°C.


Température moyenne annuelle - réchauffement en °c en fonction de l'année

Ce processus doit être répété pour chaque modèle climatique. En effet, les projections réalisées avec différents modèles peuvent atteindre le niveau de réchauffement souhaité à des moments différents, par exemple en raison d’une sensibilité climatique différente ou simplement de la variabilité naturelle du climat.


Les années pivots dans les projections de la TRACC


Pour produire les projections de la TRACC, Météo France a utilisé cette méthode avec les jeux de projections DRIAS 2020 (en réalité des projections CMIP5/EuroCordex débiaisées) pour le scénario d’émissions RCP8.5.


Météo France n’a pas communiqué les périodes pivots pour chaque projection. Mais elles peuvent être facilement déduites des séries temporelles publiées sur DRIAS :


Périodes pivots pour chaque couple de modèles et scénario de la TRACC


Si on prend l’exemple du premier couple de modèles : pour les projections CNRM-CM5/Aladin63, le climat du scénario “tendanciel” (+3°C en moyenne mondiale) correspond à la période 2070–2089 du scénario RCP8.5. L’année pivot est donc 2079.


Le scénario “Accord de Paris optimiste” (+1.5°C en moyenne mondiale) correspond lui à la période 2031–2050 du même scénario, soit un pivot en 2040.


Pourquoi s’intéresser à ces “années pivots” ? Au-delà de la simple curiosité, connaitre les périodes correspondant aux niveaux de réchauffement permet de réaliser des projections compatibles avec la TRACC.

On peut ainsi, par exemple, produire des indicateurs qui n’ont pas encore été traités par Météo France ou réaliser des projections pour d’autres zones géographiques que la France métropolitaine.


 

Si vous souhaitez réaliser des “projections TRACC” sur mesure, pour des indicateurs et des régions du monde propres à votre activité, ou bien simplement mieux comprendre les différents scénarios et modèles climatiques, Callendar peut vous aider !

Pionniers de l’évaluation des risques climatique en France, nous aidons les entreprises à mettre en place une démarche d’adaptation basée sur la science avec des projections locales, opérationnelles et alignées sur les politiques publiques. Vous avez une question sur l’évolution du climat et ses impacts ? Contactez-nous pour en discuter !

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